Cette série d’articles enfonce des portes ouvertes. Parce que le niveau d’amateurisme et de paresse intellectuelle crève le plafond dans pas mal de domaines (via réduction du nombre de mots utilisés en français, réduction de la longueur des phrases, absence de lecture et de documentation, répétition systématique des informations via réseaux sociaux etc). Parce que moi-aussi bien sûr je suis touché par ça. Et parce qu’il est hors de question que je ne fasse rien et accepte de m’adapter. Donc, dans tout ce business très faussement individualiste de compléments alimentaires, de courses à la bonne nutrition, j’en passe et des meilleures, nous sommes comme des nains sur des épaules de géants, et des nains particulièrement pas malins, me semble-t-il. Sans doute parce que notre cher Etat a délité et délite encore le lien social, est au service de l’économique, des intérêts privés de certains, et que l’intelligence, ça n’apporte pas du positif dans une telle démarche. Comment se repérer dans un tel océan de bêtise? Je me dis que si chacun apporte sa vraie connaissance, conquise par le travail et l’amour des choses, on peut peut-être bien en faire des belles, des choses…

 PREMIER CLICHE:« Que la nourriture soit ta première médecine »

Un ouvrage du Professeur Joyeux commence par cette citation d’Hippocrate.

Ahhh Hippocrate… En voilà, une valeur sûre, et qui en impose. Si c’est pas du solide, ça ! Et en plus, cité par le Professeur Joyeux. Voilà qui laisse présager d’un ouvrage sérieux, vous me direz ! Et bien pas du tout. En tout cas, pas pour cette citation. Comme beaucoup d’autres, dans notre époque hyper mentale et intellectuellement très paresseuse (oui, depuis Platon, le mental peut se décliner en deux familles : d’une part les opinions avec « connaissances » vagues mises bout à bout -on vit là-dedans : journalisme, politique, édition, enseignement même-, d’autre part l’intellect, pas du tout déconnecté du réel ni de la vérité, au contraire plein de vie, de créativité, d’esprit critique, mais qui nécessite du travail, de la logique, la vraie, pas celle qui nous arrange, mais celle qu’on va apprendre, retrouver).

Bon, allons à l’essentiel… cette citation est fausse, elle n’existe pas. Ni en traduisant mal, ni nulle part chez Hippocrate. Et Hippocrate ne pense pas cela, en tous cas pas comme on le comprend nous…

Quel est l’intérêt de dire cela?

1-Peu de personnes vont lire les auteurs dans le texte original. Or c’est là qu’est la connaissance, la logique, l’observation, l’intelligence. Pas dans des articles Femme actuelle ou des copier-coller de réseaux sociaux, qui peuvent par ailleurs être sympathiques à lire. Où donc alors se trouve la connaissance? Sans doute dans des espaces où notre cerveau ne prend pas « tout cuit » des informations vagues et peu fiables, mais où il apprend à se repérer à comprendre ce qui pour chacun est bon, avec des modèles d’intelligence, de créativité.

2-Hippocrate pense que les aliments sont une base importante de la médecine. Sauf que… sauf que le premier aliment, pour Hippocrate, c’est l’air. Pour lui, sans une bonne respiration, vous pouvez manger et boire ce que vous voulez, ça ne change pas grand chose. Quelle absurdité, me direz-vous?! Mais c’est la base de la digestion, de la gestion du stress et de beaucoup d’autres choses, la respiration. Et c’est évidemment une des bases théoriques fondamentales de la santé en naturopathie. On n’en tire pas les conclusions qu’il faudrait, bien sûr, mais c’est normal: paresse intellectuelle, jeunesse du renouveau naturopathique en occident etc. On sait pertinemment que vous pouvez manger bio, local et tout et tout, si vous êtes complètement déprimé.e, seul.e sur votre canapé, à moitié en apnée, votre digestion a de bonnes chances d’être catastrophique. Alors que manger moyennement qualitatif mais entre amis dans une bonne ambiance, du rire, de la détente, c’est la garantie d’une digestion bien meilleure. Et tout le reste, ce sont des opinions, c’est-à-dire la croyance qu’une chose est vraie parce que vous l’avez entendue mille fois, et que donc forcément, c’est sûr! (à moins bien sûr de consommer des poisons…). Ainsi le culte de la nutrition, dont l’origine est à chercher dans l’hygiénisme, mais aussi dans des mécanismes disciplinaires et économiques. Voir le traité d’Hippocrate Des Vents, paragraphe 3: le corps des hommes est animé par trois types d’aliments, et le premier est l’air.

Donc non, la base, c’est la respiration, pas les aliments solides. Et désolé si c’est pas assez rentable, comme idée. La qualité de l’air, la nature de l’air (humide, sec, océanique etc), sa densité en ions négatifs (oui, ça, un jour, il faudra s’y intéresser vraiment), la manière dont je respire (avec souplesse, avec raideur, en forçant ou tranquillement, amplement via des émotions accueillies ou en retenue etc). Et tout ça évidemment se travaille, s’améliore: on peut faire du sport, si possible avec conscience et pas seulement pour vomir ses angoisses. On peut marcher en conscience. On peut méditer de 1000 manières (en jardinant, en faisant la vaisselle, en faisant… tout ce qu’on a à faire, en respirant consciemment). On peut bien sûr aussi être accompagné, afin d’améliorer cette respiration en déstockant, réorganisant nos émotions. Notre respiration s’améliorera d’elle-même. Et ce n’est qu’un chemin parmi d’autres.

Peu de temps après le premier confinement, une jeune patiente est venue me voir, insistant sur le danger du covid. Elle avait eu un état de type grippal assez sévère. Je l’écoutais, évitant de lui dire qu’à l’époque d’avant la névrose collective aiguë, je croisais chaque année plusieurs collègues alités 2 voire 3 semaines du fait de la grippe, particulièrement affaiblis. J’écoutais son argument phare: « c’est dangereux, car moi je mange bio, et j’ai été très malade quand même ». Sous-entendu « donc je suis plus résistante en mangeant bio ». Or, pas du tout: ce n’est pas la première clé. En étant très stressé, très bloqué, ce que j’ingurgite n’est que secondaire, car peu et très mal intégré. Et c’est sans compter sur les clichés d’un alimentation saine donc peu carnée, où les carences viennent vite pour une personne fortement stressée, via la déminéralisation notamment. En apnée respiratoire, avec un stock d’émotions aussi massif, il y a fort à parier que le covid a « tapé » exactement où il ne fallait pas : au niveau pulmonaire, siège de la tristesse. Cela n’explique pas tout, mais c’est une clé possible parmi d’autres.

Pour résumer, Hippocrate n’est ni le parrain ni l’ancêtre du business nutritionniste actuel. Ce dernier fonctionne sur des valeurs d’époque: priorité de l’avoir et de la consommation sur l’attention, le lien social et l’écoute de soi.

L'Antiquité, ça déchire: on cite un auteur, sans vérifier, et hop ça fait sérieux et on emballe l'auditoire!

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Eddy Mannino

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